Il est difficile aujourd’hui, lorsque l’on cherche des informations sur le monde, d’échapper à l’omniprésent Covid-19. Les bulletins d’information en sont plein et il tient tellement de place que parfois c’est le seul sujet traité. On pourrait même, peut-être, juger de la capacité des pays à contenir l’épidémie, à la place que le virus laisse au reste de l’actualité dans les journaux télévisés.
Les chaînes d’information en continue peinent à parler d’autre chose alors même que l’on sent leurs « envoyés spéciaux » à la peine quand il leur faut remplir une intervention locale d’une ou deux minutes. Certains sont cependant des sortes de « magiciens » qui réussissent à parler plus d’une minute pour vous expliquer qu’il n’y a, en fait, aucune nouvelle. Leur intervention se transformant en « pseudo nouvelle », ce que l’on nous impose à longueur de bulletins d’information.
Je suis allergique aux « pseudo nouvelles » et n’étant pas médecin spécialiste des épidémies je m’abstiendrai de commentaires sur un sujet sur lequel même des médecins spécialistes n’arrivent pas à s’entendre.
D’autant que la façon mélodramatique, beaucoup trop émotionnelle et très souvent incompétente dont le sujet est traité cache à la vue d’autres informations très importantes également. La situation en Ukraine en est un bon exemple.
Après son élection qui avait redonné certains espoirs de solution politique à la crise ukrainienne, il apparaît que Vladimir Zelenski soit absolument incapable de faire avancer la situation dans cette direction. Je lui fais crédit d’un réel désir de pacifier son pays et de préserver son intégrité, mais il est incapable de faire quoi que ce soit pour y parvenir. C’est qu’il a face à lui une opposition néo-nazie extrêmement forte. La victoire éclatante de Zelenski à l’élection présidentielle avait été vue comme une défaite cinglante du mouvement néo-nazi. Mais, même s’il a quitté le pouvoir, ce mouvement est toujours bien présent, fortement armé et résolu. Zelenski n’a pas la volonté ou le pouvoir de lui tenir tête.
C’est pourquoi la situation politique est bloquée. Les néo-nazis sont violemment opposés à toute négociation avec les représentants du Donbass, il n’y aura donc pas de négociations et sans négociation il ne peut y avoir de solution politique au problème de l’Ukraine de l’Est. Exit les accords de Minsk.
Le personnage central de l’Ukraine aujourd’hui, celui qui tire les ficelles est Arsen Avakov, ministre de l’intérieur depuis février 2014. C’est lui qui, en novembre 2014, nomma le chef adjoint du bataillon Azov, Vadim Troyan, au poste de chef de la police de Kiev. Bien qu’il soit lié au milieu néo-nazi ukrainien, dont il sait utiliser les différents groupuscules selon ses besoins, Avakov ne semble pas lui-même partager leurs convictions. Il semblerait qu’en fait, ce qui l’intéresse c’est le pouvoir pour le pouvoir. C’est sans doute pour cela qu’il est soutenu par les Etats-Unis.
Y a-t-il un espoir d’évolution sur le plan de la politique intérieure ? Je ne vois pas d’alternative à Zelensky. Selon des observateurs politiques étrangers qui connaissent la situation ukrainienne, trois noms dominent le paysage politique : Vadim Rabinovitch, homme d’affaires, président du Congrès juif ukrainien et candidat aux élections de 2014, et Olena Lukash, juriste, ancien ministre de la Justice, mais, depuis 2014 elle est poursuivie pour complicité de meurtre pendant le coup d’état de Maïdan, et figure sur la liste des sanctions de l’Union Européenne. Aucun des deux ne dispose des appuis politiques suffisants pour revenir au pouvoir. Le troisième, Viktor Medvechuk a une vraie stature d’homme d’état, il pourrait négocier avec les représentants du Donbass avec lesquels il entretient des liens mais il a un grave « défaut », il est réputé proche de Vladimir Poutine. Il a d’ailleurs fait plusieurs voyages à Moscou récemment, pour rencontrer le président russe ou le président de la Douma avec lequel il essaie de mettre en place un groupe de discussion entre parlementaires russes et ukrainiens.
Sur le plan économique, l’Ukraine est un pays complètement désindustrialisé dont l’économie est en chute libre. La séparation imposée avec la Russie a eu raison d’une industrie riche y compris dans des secteurs de pointe comme l’aéronautique, mais dont le voisin russe était le principal client. Tout ce qu’elle peut vendre aujourd’hui c’est une force de travail à bas prix en Pologne et dans certains pays de l’Union Européenne et ses terres fertiles (les « terres noires » du sud du pays). Même la russophobie dont elle a fait un temps commerce n’intéresse plus beaucoup ses « parrains ». D’autant que ces derniers, qui sont à l’origine du chaos ukrainien, ont réalisé le coût d’une remise en état du pays et ne sont pas prêts à le supporter. De plus, ils doivent faire face à une urgence sanitaire, à la crise économique qui suivra, et pour couronner le tout, à la guerre des prix du pétrole. Espérons que la crise financière qui se profile attendra un peu. Elle sera provoquée par les méthodes mêmes employées pour éviter la crise : ajouter de la dette à la dette.
On ne peut pas ne pas mentionner la pandémie en cours. Les nouvelles dans ce domaine sont rare en provenance d’Ukraine et de toute façon elles ne sont pas crédibles. Il n’y aurait que 83 cas confirmés et trois morts. Mais on apprend de sources médicales que les hôpitaux sont pleins et incapables de faire face. Qui en serait surpris en pensant au chaos économique qui règne dans le pays. Quel genre de risque sanitaire l’Ukraine pourrait-elle faire courir au reste de l’Europe dans quelques mois ?
Mais le pire, c’est que l’on n’aperçoit pas d’issue possible dans l’état actuel des choses. Les pays qui entouraient l’Ukraine de Maïdan, les Etats-Unis et l’Union Européenne avaient déjà tendance à se désintéresser de son sort à la fin de l’année dernière. Que dire maintenant qu’ils ont à faire face à deux ou peut-être trois crises ?
L’Occident et la Russie devraient être capables de travailler ensemble au redressement de l’ensemble du pays et pas seulement du Donbass, mais pour cela il faudrait que s’installe à Kiev un gouvernement acceptable par tous ces pays et enfin, il faudrait dans un premier temps désarmer les groupes néo-nazis ce qui ne sera pas une mince affaire, puis arrêter ou expulser leurs membres. Le nouveau gouvernement devrait avoir une solide volonté pour y parvenir.
Sinon, l’Ukraine risque d’éclater en quatre ou cinq parties qui se rapprocheront de leurs voisins respectifs.
Pendant ce temps, passé le pic de l’épidémie, les gouvernements occidentaux vont devoir expliquer à leurs citoyens pourquoi le système libéral n’a pas été en mesure de les protéger, pourquoi le secteur privé ne peut sauver la situation et à quel point les Etats-Unis sont devenu un état dysfonctionnel. Pour le moment, les politiques cherchent à montrer comment ils s’emploient à protéger les populations, mais quand viendra le temps des bilans, on se demandera qui a fait quoi, qui est responsable de cette situation qui a laissé les populations en danger, pourquoi les citoyens ont dû rester enfermés chez eux dans la plupart des pays occidentaux mais pas dans certains pays asiatiques, quels pays ont aidé quels pays, quels pays se sont renfermés dans leur égoïsme, etc…
Les vues et les opinions exprimées dans cet article ne reflètent pas forcément celles de l’Alliance Franco-Russe.
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