Le climat des relations internationales se tend de plus en plus. Cela devrait se poursuivre pendant encore un peu plus d’un mois à mesure que les Etats-Unis approchent de la prochaine élection présidentielle le 3 novembre et du chaos que l’on nous promet après cette date en cas de victoire de Donald Trump.

Au moment où les régimes occidentaux demandent une nouvelle vague de sanctions contre la Russie suite à la nébuleuse affaire Navalny, le président américain, Donald Trump, lui, se vante d’avoir envisagé l’assassinat du président syrien Bachar Al Assad, sans éveiller de réactions du côté européen. Il faut dire que les USA n’en sont pas à leur coup d’essai dans le domaine de la violation du droit international et des assassinats « ciblés ». A côté de son prédécesseur Barak Obama, Donald Trump ferait presque figure d’amateur. Leurs alliés seraient donc blasés ?

On dirait plutôt qu’ils ont porté le maniement du « deux poids deux mesures » et du « en même temps » à des niveaux de maîtrise inégalés à ce jour.

Ainsi donc, Alexei Navalny est sorti du coma et il se refait une santé, c’est tant mieux pour lui. Après avoir été traité en Russie par des médecins qui lui ont sans doute sauvé la vie, sa famille a demandé qu’il soit envoyé en Allemagne à l’hôpital de la Charité. Après plusieurs jours de traitement par des médecins de cet hôpital, des prélèvements ont été envoyés à un laboratoire militaire où on a découverte des traces d’un poison violent de « qualité militaire », le tristement célèbre « Novichok ».

Les autorités allemandes ont immédiatement accusé la Russie de tentative d’assassinat, sur la personne de celui que les médias occidentaux ont qualifié il y a déjà longtemps de « plus dangereux opposant à Vladimir Poutine ».

Résumons donc la situation : le pouvoir russe décide d’éliminer cet « opposant » et pour plus de sûreté, elle décide d’utiliser un poison extrêmement dangereux. Ensuite il laisse ses propres médecins sauver la victime et, pour couronner le tout, il autorise son transfert en Allemagne où on ne manquera pas de découvrir des traces de ce poison que les enquêteurs anglais connaissent bien. Quoi d’autre ? Ah oui, ce poison mortel a déjà été utilisé en Angleterre où il n’a pas tué un père et sa fille, les Skripals.

Devant la faiblesse des éléments présentés jusque-là, l’Allemagne a « sorti » une bouteille d’eau en plastique, remise par des membres de la famille Navalny et sur laquelle il y aurait des traces de ce poison mortel. Mais comment cette bouteille a-t-elle été transportée en Allemagne ? Les proches de Navalny l’ont manipulée ? Il est logique de penser qu’ils l’ont fait, mais alors ils devraient être aussi dans le coma. Ont-ils pris des précautions, mais alors ils savaient que toucher cette bouteille était dangereux… Comment le savaient-ils ?

 Deux semaines après les accusations de Mme. Merkel, les Allemands n’ont pas plus apporté de preuves de ce qu’ils avançaient que les Anglais qui, il y a deux ans, accusaient aussi la Russie de Vladimir Poutine. Ils déclarent que ces preuves ont été transmises à l’OPCW dont la Russie est membre, mais à La Haie on dit ne pas avoir reçu ces preuves, tout au plus une courte lettre. On conseille donc à la Russie de s’adresser à l’Allemagne qui avait déjà conseillé à la Russie de s’adresser à l’OPCW. Vous suivez ?

Maintenant, le haut représentant de l’Union Européenne pour les affaires étrangères, Josep Borell, suggère de créer une liste de sanction contre la Russie à laquelle on donnerait le nom de « liste Navalny ». Après tout, les Etats-Unis ont leur « liste Magnitsky », non ? Ce faisant il donne raison à Serguei Lavrov qui suggérait récemment que les pays de l’Union Européenne étaient obsédés par l’idée d’être à la traine des USA dans la « punition de la Russie ».

Interrogé sur la première chaine de télévision russe en début de semaine, le ministre des Affaires étrangères russe expliquait : « Malheureusement, l’Union Européenne a choisi de sacrifier ses propres intérêts géopolitiques et stratégiques dans son désir à court terme de ne pas « être à la traine » des Etats-Unis dans ce que l’on appelle « punir la Russie », nous commençons à en avoir l’habitude. Dans ces conditions, il est nécessaire de prévoir un « filet de sécurité » dans nos relations avec l’Union Européenne. Par relations, je veux dire un retour à un vrai partenariat ».

Lavrov a expliqué que si l’Union Européenne s’en tenait à sa position négative et destructrice, la Russie ne devrait pas dépendre de ses caprices, mais assurer son développement elle-même et avec les pays désireux de coopérer sur une base d’égalité et de respect mutuels.

Questionné sur la réponse russe à d’éventuelles sanctions, il a ajouté : « Nous attendons de voir ce que seront ces sanctions. Nous allons certainement réagir. On ne peut pas rester sans répondre, tout d’abord ce serait une erreur du point de vue des règles de la diplomatie. Ensuite, nous voulons limiter l’influence négative de certaines structures d’état occidentales, d’état et aussi de soi-disant organisations non gouvernementales ».

Il a expliqué que l’histoire des sanctions a démarré avant les évènements ukrainiens et le référendum de Crimée. « L’administration Obama a lancé le mouvement quand Edward Snowden est arrivé sur notre territoire après avoir été poursuivi. Il a évidemment dû enfreindre des lois américaines, mais il a mis au jour les activités illégales d’entités américaines qui cherchent à promouvoir une approche inacceptable dans plusieurs pays étranger et à affaiblir leurs gouvernements ».

D’après Lavrov, la Russie est maintenant habituée aux sanctions. « Et ce que l’on appelle le remplacement des importations n’est qu’une vision étroite de la façon dont nous répondons aux sanctions ».

« La principale réponse géopolitique est que pendant ces années, nous avons compris que nos partenaires occidentaux, y compris les membres de l’Union Européenne n’étaient malheureusement pas fiables. Nous avions beaucoup de projets ambitieux, nous avons fait des plans sur les différentes façons de développer notre coopération dans les domaines de l’énergie, des hautes technologies et de la coopération économique en général ».

« Notre position géographique, nos communications et nos infrastructures sur le continent eurasiatique nous donne un avantage compétitif sérieux. Si nous et l’Union Européenne ainsi que d’autres pays voisins, comme les membres de l’OCS, de l’Union Economique Eurasiatique et les pays de l’Asean qui sont tous proches, ne tirent pas avantage de cette position dans la compétition géopolitique et géoéconomique qui se dessine, ce sera certainement une grave erreur ».

Mais c’est aussi le cauchemar des Etats-Unis. D’où les manœuvres visant à isoler la Russie et les menaces envers les alliés européens des USA à chaque rapprochement avec Moscou.

Pour ce qui est de la Russie, comme le sous-entend Serguei Lavrov, la porte n’est pas fermée, mais c’est à l’Union Européenne de faire la preuve de sa bonne foi.

La question qui me taraude est celle de l’opinion que les dirigeants occidentaux ont du niveau intellectuel de leurs concitoyens. Pensent-ils vraiment que les tentatives récentes d’infantilisation commenceraient à porter leurs fruits ? Que les citoyens occidentaux seraient prêts à croire tout ce qu’on leur dit, sans preuves ? La pandémie a effectivement permis de tester l’obéissance aveugle et le manque de réaction des populations, mais en sommes-nous déjà à ce niveau de renoncement ?