Début 2014, à la suite du coup d’état en Ukraine et de la réaction (prévisible) de la Russie concernant la Crimée, l’Union Européenne, sous la pression des Etats-Unis, instaurait un régime de sanctions contre la Russie, ses entreprises, ses banques et ses entrepreneurs.
Questionné sur ce sujet, lors de sa dernière séance de questions au pays, le président Vladimir Poutine a précisé : « Selon les données d’experts, en raison de toutes ces sanctions et restrictions, depuis 2014 la Russie a subi une perte de 50 milliards de dollars, alors que l’Union européenne a perdu 240 milliards de dollars, les Etats-Unis 17 milliards de dollars (nous avons de faibles échanges commerciaux avec eux), et le Japon 27 milliards de dollars ».
Pour faire face, la Russie a dû commencer à fabriquer elle-même des produits qu’elle importait auparavant, comme les moteurs marins ou les moteurs d’hélicoptère qui étaient fabriqués en Ukraine.
La réponse de la Russie à ces sanctions a été d’interdire, en août 2014, les importations de fruits et légumes, de produits laitiers et de viande en provenance des pays qui avaient initié les sanctions. Au départ, l’Union Européenne, les Etats-Unis, le Canada, l’Australie et la Norvège.
Quelle ont été les conséquences de ces « contre sanctions » sur l’agriculture Russe ?
D’après les chiffres de ministère de l’Agriculture, les importations de produits alimentaires ont baissé de 31,2%, passant de 43,3 milliards de dollars en 2013 à 29,8 en 2018. Sur la même période, les exportations de ces produits sont passées de 16,8 à 25,8 milliards de dollars, la croissance la plus importante étant relevée dans la viande, les matières grasses, le poisson, les produits de la mer et les produits transformés. La Russie est également devenue le premier exportateur mondial de blé.
Cependant, le président de l’association des producteurs de viande Serguei Yushin explique que le développement de ce secteur avait débuté bien avant l’imposition des sanctions et des contre sanctions, en 2006-2007, en raison d’un important programme fédéral de soutien à ce secteur. Il fait d’autre part remarquer que les contre sanctions ne touchent pas les plus gros producteurs mondiaux de viande que sont, le Brésil, le Chili, l’Argentine et l’Inde.
Mais, dans l’ensemble, après cinq ans de sanctions, la part de la production russe de produit alimentaire dans les magasins est passée d’un peu plus de 30% à 80% en 2018. Ce niveau atteint aujourd’hui 95 à 100% pour les céréales, les huiles végétales, le sucre, la viande et les produits carnés. Mais la Russie n’est toujours pas auto suffisante en sel et en lait (respectivement 64,2 et 84,2%).
D’après le Centre Russe pour les Exportation, d’un point de vue purement financier, les producteurs ont plus bénéficié de la forte baisse du rouble que de l’embargo.
Mais l’évolution n’est certainement pas terminée, car, comme le fait remarquer le Sénateur Alexei Pouchkov dans son dernier livre (à paraître en France en septembre) « Le Jeu Russe, sur l’échiquier mondial » : « Pour l’Union Européenne, le maintien des sanctions est devenu une façon de préserver le statu quo et de prévenir une fracture interne, plutôt que le moyen d’atteindre un objectif. C’est là que se cache la malignité des sanctions, contre ceux qui les ont introduites, car, pour l’Union Européenne : il est plus simple de les garder que de les annuler et de risquer de provoquer une rupture parmi ses membres ». L’agriculture russe a donc encore du temps, pour profiter de la situation créée par les USA et l’Union Européenne.
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